HISTOIRE ET ÉTAT DES ARTS INFORMATIQUES

© 2000, Patrick Saint-Jean

PROLÉGOMÈNES : Éditorial Une veille de l'état et de l'histoire des arts est utile à la compréhension et à la pratique de tout art dans une démarche esthétique non esthétisante, pour éviter l'obscurantisme au nom d'une idéologie sectaire ou d'une pensée unique, et par conséquent nécessaire de la porter à la connaissance, à la sensibilité et à la réflexion de chacun et de tous. Donc de mettre en ligne et en interaction une veille de l'état et de l'histoire des arts informatiques sur le réseau Internet est apparu indispensable et inévitable.

Cette veille est une démarche et un processus associé bouclés coopératifs d'action, d'interaction et d'observation, de qualification, de quantification et d'estimation, d'acquisition, de traitement et d'analyse, d'évaluation, de choix et de décision, de synthèse, de simulation et d'expression de la connaissance et des savoirs faire visant à agir, à se faire une idée et à imaginer ce qui s'est passé, ce qui est et qui sera ou sera peut-être.

Cette veille, nous pouvons choisir de la faire mentalement dans les cas simples, mais la veille assistée par ordinateur en réseau (VAOR) peut donner plus d'efficacité, d'objectivité et de véracité dans les démarches employées, les stratégies appliquées, l'obtention de résultats et les objectifs à atteindre, évitant l'exclusion et la xénophobie, quitte après coup de choisir un mode d'expression plus personnel, plus subjectif, plus théâtral, voire même polémique pour plus d'interaction et d'expression singulière ou communautaire (le populisme extrémiste étant à mettre au second degré pour prêter à réflexion).

L'implication est donc dans le processus lui-même mais également dans la veille du processus permettant son contrôle et son évolution ainsi que son propre contrôle et sa propre évolution dans lesquels on s'est engagé mentalement (et physiquement).

Pour cela la démarche est basée sur le principe d'évolution texturante à structuration dynamique.

Ainsi :

- Prenant d'emblée comme point de départ servant d'image instantanée ergodique du passé contenant des connaissances comme des ignorances, un document structuré linéairement "Histoire et état de l'art informatique" (O. Bréaud CC, P. Saint-Jean MC, directeur de rédaction, polycopié CNED et UFR 04, Arts Plastiques et Sciences de l'Art de l'Université de Paris I Panthéon Sorbonne, 1993-94),

- Enclenchant un processus interactif d'une part de complémentation par mise en abîme et en profondeur récursive (un mot clé ou une image est transformé en lien qui fait appel à une autre page avec retour qui elle-même peut faire appel à d'autres pages avec retour, etc.), et d'autre part de texturation par une mise en liens colorés pour structurer dynamiquement les concepts dans leurs contextes synchronique et diachronique, à travers la navigation.

- Et effectuant un processus de revue et correction après nouvelle synthèse convergeant vers un point de vue global stable n'excluant pas les points de vue locaux et singuliers,

- Ce document sera actualisé et implémenté régulièrement par touches successives comme sur une toile de peinture de l'histoire,

- Soit à partir des informations fournit par des événements réguliers : Siggraph (Convention on Computer Art, Computer Science, Computer Graphics by ACM, Association on Computing Machinery) et Imagina (Festival de l'image de synthèse),

- Soit selon des événementiels,

- Soit selon notre vécu depuis plus de trente ans d'expérience en les domaines et champs de réflexion concernés,

- Soit selon votre propre vécu (envoi par e-mail ou utilisation de la fonction "Dialogue contradictoire" de l'Univers, Cités Virtuelles Interactive).

Ainsi l'Histoire se met en action, en scène multimédia numérique.

Quand un nombre restreint d'éditions abreuvent une communauté réduite d'individus, les publications-papier durables ne rendent plus compte du champ de création et d'application ou du domaine de réflexion. Les médias (radio, télévision) en multipliant les chaînes prennent le relais de façon événementielle et produisent des publications audiovisuelles (vidéo cassettes, disques). Le Design multimédia sur cédérom et DVD offre une solution plus active mais c'est le Design de Cyberespaces en réseau qui peut créer le spectacle de la connaissance, l'éducation et la création qui invitent à la concrétisation, à l'abstraction et à l'imagination de la connaissance et des savoirs faire.

Si l'on considère les arts informatiques selon les écritures, l'absence des mots va faire prêter à confusion en arts plastiques et surtout en esthétique, car les mots n'existent pas toujours en langue française avant les pratiques et les censures ou simplement les indifférences éditoriales ou institutionnelles provoquent et amplifient souvent des décalages historiques entre pays, entre disciplines.

Mais si on considère l'Histoire des arts informatiques dans le sens du Design, l'histoire de la pratique et de la production au travers des objets, des dessins, des esquisses, des peintures, des photographies, est plus ancienne que l'Histoire au travers des écrits (temps de publication) et est souvent au début et au coeur même de la création.

Et l'Histoire par le multi-média (plusieurs supports concrets de conception, d'existence, d'échange, de communication) retrouve tout son sens dans le multimédia traité et distribué dans l'unimédia numérique réparti en réseau.

Mais nous ne pouvons qu'être conscient qu'à chaque instant l'expression de l'Histoire exposée est relative et que chaque consultation et évolution est un événement de l'Histoire de ce document qui le fait converger vers une stabilité que seule l'Histoire définie dans le futur en confirmera sa validité historique. Car les choses ne sont pas toujours comme on vaudrait qu'elle le soit et la vérité s'impose d'elle même telle qu'elle est.

La veille de l'Histoire et de l'Etat des arts informatiques est donc à la fois un témoignage d'après ceux qui font l'Histoire et de ceux qui en feront partie et un acte historique, pour aider à une réflexion personnelle nécessaire à la constitution de sa propre image mentale de l'Histoire permettant d'agir et de communiquer.

L'informatique, dont l'évolution conditionne et est conditionnée par les applications et les besoins engendrés ou génériques d'évolutions des utilisateurs et des créateurs, nous ferons évoluer la réflexion vers les contenus qui montrent les différents mouvements entre les pionniers, les expérimentateurs, les théoriciens, les chercheurs, les auteurs, les compositeurs, les créateurs et les diffuseurs qui participent et coopèrent aux domaines des arts informatiques (art informatique : "computer art" , infographie : "computer graphics", science informatique : "computer science", langages informatiques : "computeur language", écriture informatique : "computer script", l'esthétique numérique : "computer aesthetics", art réseau : "network art", musique informatique : "computer music", "formalized music", multimédia : "multimedia"), où le Design (numérique, virtuel, informatique) est toujours présent pour garantir la dimension plastique, appliquée et esthétique de la conception à la réalisation.

Arts mécaniques, arts chimiques, arts analogiques, arts électroniques, arts photoniques, arts cinétiques, arts numériques, arts informatiques, arts conceptuels, arts communicationnels, arts conceptionnels sont également autant de mots clés et de pratiques qui s'articulent entre eux.

INTRODUCTION

La première vision globale plutôt américaine du domaine des arts informatiques est due à l'abondance et à l'impact par les médias (diffuseurs) des publications en langues anglo-saxonnes, et constitue un filtre culturel au début de son histoire et dans sa continuité.

Dans une vision au sens du Design de conception, de réalisation, de production, d'expression et de communication, la préhistoire des arts informatiques commence en fait avec l'histoire des calculateurs arithmétiques et logiques, analogiques puis numériques donc au moins avec l'histoire de l'expression du calcul de la mécanique céleste. Mais l'Histoire proprement dite commence dans les années 60 avec l'utilisation de la 3D très abstraite et la 2D très varier et expérimentale au sens de la peinture ou du dessin numérique.

Quand l'histoire apparaît au public, si aux départs la chose paraît être le fait que de quelques initiés osant se montrer, nombreux sont, depuis les années 80, les exemples d'émissions de télévision, d'émission de radio et d'articles de presse, consacrés exclusivement aux images informatiques. Reste alors à se demander pourquoi ces images figurent si souvent au sommaire de l'actualité. À cette question peuvent correspondre trois explications somme toute assez liées : premièrement, parce que ces images ont rencontré de très nombreux domaines d'application, et sont, au fil des années, devenues presque incontournables pour qui cherche à rendre compte de l'évolution de notre société. Deuxièmement, parce qu'elles apparaissent tous les jours dans des génériques d'émissions, des spots publicitaires et des clips et maintenant dans les films et dans les émissions elles-mêmes (acteurs synthétiques en temps réel), qui, comme tout ce qui se rapporte aux médias, font eux-mêmes partie des sujets aujourd'hui les plus prisés par ces derniers. Enfin, parce que la séduction qu'elles exercent lors de ces passages à la télévision n'a d'égal que la fascination qu'incite leur mode de fabrication où la critique polémique qui l'intègre globalement dans la peur du nouveau, dans le cadre de la vision "Big Brother" de l'informatique. L'arrivé du réseau de réseau (Internet) a amplifié le phénomène et en même temps déstructuré les conservateurs, les réfractaires, les irresponsables "intégristes du refus systématique", les iconoclastes et les "artistes frileux", pour obtenir progressivement la reconnaissance institutionnelle globale ou tout est possible, même de faire semblant, mais laissant encore des espaces libres dans le champ artistique à des problématiques nouvelles et contemporaines.

Or l'intérêt que ces images ne cesse de susciter pose le problème pour qui s'intéresse à l'évolution de l'informatique dédiée au graphisme. Il menace, en effet, de ne lire l'histoire de cette discipline qu'au seul regard de sa phase de développement. En témoigne le terme "infographie" qui aujourd'hui se voit utilisé pour désigner l'ensemble des images informatiques alors qu'il n'a été créé que dans le courant des années 1970, en réponse à la soudaine augmentation de leur production, et à l'urgence par conséquent, de trouver une appellation permettant leur regroupement. Alors qu'en fait la vraie problématique s'ouvre aux graphistes, aux artistes, qui connaissant d'autres techniques ou voulant aborder leurs approches de façon moins conventionnelle sont en quête de nouveaux matériaux, de nouvelles matières, de nouveaux supports, de nouveaux moyens d'expression, d'expérimentation et de production pour satisfaire leurs désirs, leurs plaisirs, leurs volontés, leurs pulsions et leurs vies artistiques.

Quant à la régulière diffusion de ces images au travers d'un média aussi puissant que celui de la télévision et maintenant le WEB, elle risque elle aussi de fausser leur connaissance, certains étant inévitablement conduit à penser ou à prendre pour argument subjectif, que leur production se concentre essentiellement sur les effets spéciaux et autres "morphing", alors qu'en fait, en démarche et en problématique, elle se présente sous les formes les plus diversifiées du 2D au 3D, de l'image fixe à l'image animée et projetée en espace, au multimédia, et au design du concept en cyberespace.

D'où la nécessité de replacer ces images dans leur contexte historique et d'énoncer leurs différents champs d'application ou plutôt d'expérimentation et de création dans le domaine des arts plastiques et des arts appliqués.

Ainsi pourrons-nous peut-être, sentir et nous faire une idée, une image de la continuité globale de la démarche artistique qui par ses problématiques utilise et participe à la création tant de sa propre expression locale variée et chaotique, que technologique par sa récupération, son appropriation et son exigence de qualité optimale et différenciée remettant en cause et en permanence son propre et impropre statut.

HISTORIQUE

Deux remarques s'imposent avant de commencer cet historique :

1) De façon globale, un décalage peut généralement être observé entre le moment où est mis au point une nouvelle technique (de type logiciel ou matériel) et celui où cette invention est connue d'un nombre suffisamment grand de professionnels pour permettre la génération d'images témoignant de cette avancée précisément. Mais en contrepartie, une fois ces images plus largement diffusées, un phénomène d'imitation est aussitôt engendré. Ainsi, doit-on par exemple attendre les années 1980 pour voir véritablement apparaître au sein des représentations des objets texturés et éclairés d'une manière réaliste, alors que la plupart des algorithmes permettant d'obtenir ces effets sont découverts dans les années 1970. Puis assistons-nous soudain à la production de plusieurs réalisations dans lesquelles ces effets sont largement utilisés, voire systématiquement mis en avant. Mais une analyse plus locale dans le temps, l'espace et l'action, concernant les communautés et les domaines, permet d'observer d'une part les échanges et influences entre les travaux scientifiques, artistiques et littéraires, et d'autre part les changements de lieux géographiques de production ou de réalisation, liés au marché, tout comme l'influence et les échanges liés aux voyages des auteurs connus ou des acteurs moins connus, ou le développement des médias d'information (publications, colloques, etc.), où l'expérience des uns profitent aux autres qui savent mieux en tirer partie et qui par leurs environnements productifs n'aboutissent pas qu'à des expériences ou des essais artistiques mais à de véritables productions industrielles (matériels et logiciels) ou de réalisations artistiques médiatisables s'intégrant facilement au show-business. Les concepts, idées, expériences, réalisations et techniques obtenus par effet de décalage et recyclage, par récupération, adaptation et "catalyse", successivement avec les calculateurs analogiques puis numériques, les centres de calcul devenant centres informatiques, la mini-informatique de laboratoire, et la micro-informatique individuelle de plus en plus puissante en capacité, en rapidité, en quantité et en qualité d'information traitée et exprimée, témoigne d'une existence et d'un rôle sociale plus importants qu'on ne le pense et observe plus globalement.

2) Les Etats-unis ont joué un rôle déterminant dans l'histoire des images informatiques et un autre décalage a pu pendant longtemps être observé entre l'Europe et ce pays où ont initialement été développées la plupart des recherches dans ce domaine. Terre d'accueil ou d'asile, les émigrés d'Europe apporteront entre autres leurs connaissances, leurs capacités et leurs volontés de créer. L'Europe et notamment la France, enlisée et stérilisée dans ses idéologies anti-américaines et ses stratégies d'entreprises privera sa jeunesse et ratera ses plans informatiques. Malgré tout de nombreux jeunes scientifiques et artistes continueront leurs expérimentations et leurs créations.

LA NAISSANCE DU GRAPHISME INFORMATIQUE

LES ANNÉES 1950 ET LE DEBUT DES ANNEES 1960

L'informatique naît dans le milieu des années 1940 aux Etats-Unis lorsque sont fabriqués, selon les principes de Van Neumann, les premiers calculateurs numériques. Un écart marque cependant l'apparition de cette discipline et le développement de ses applications graphiques. Il faut, en effet, attendre le début des années 1950 pour que les ordinateurs possèdent en plus de leurs périphériques standards (imprimantes, cartes perforées, etc) un écran à tube cathodique. Et une dizaine d'années supplémentaires doivent se dérouler pour que soient construits des systèmes permettant la création, sur un mode conversationnel, de graphiques à part entière.

1) Le Whirlwind (illust. n°1)

Présenté généralement comme le précurseur des dispositifs aujourd'hui utilisés, le Whirlwind serait donc le premier ordinateur à posséder un système d'affichage graphique en temps réel.

En fait, cet ordinateur, construit en 1951 aux Etats-Unis dans un cadre essentiellement militaire, ne permet que l'affichage d'informations réduites sur un écran radar : l'image analogique représente les informations transmises par le radar sous forme de points lumineux ; grâce à l'action d'une sorte de pistolet électronique (capteur), l'utilisateur sélectionne deux de ces points, provoque le calcul de leurs coordonnées et la visualisation en temps réel des deux points résultant de ce calcul numérique.

Mais, il manquait au Whirlwind pour marquer véritablement l'avènement du graphisme informatique, un programme offrant la possibilité, non plus de traduire sous forme de points lumineux des informations de différentes provenances, mais de dessiner sans d'autres recours que ceux qui sont offerts par le système lui-même. Car s'il autorisait l'affichage d'une image et déjà l'instauration d'une sorte de dialogue avec elle, le Whirlwind était encore loin de permettre sa création à partir du seul écran de visualisation.

Illust. n°1

2) Le Sketchpad (illust. n°2).

C'est à Ivan Sutherland que revient la paternité du premier système informatique véritablement dédié au graphisme. Présenté en 1962 au M.I.T sous le nom de Sketchpad, ce système permet, contrairement au Whirlwind et aux autres dispositifs développés durant les années 1950, la génération sur un mode conversationnel de formes géométriques, leur modification à partir du simple maniement de boutons-poussoirs et surtout leur mise en mémoire afin de pouvoir les réutiliser par la suite. Un film, tourné en 1963, offre l'occasion au public américain de découvrir ce système. Son commentaire ici reproduit, donne un aperçu de ses possibilités.

Illust. n°2

"D'une une main, il (Sutherland) manipule une série de boutons qui indiquent à l'ordinateur quelle sorte de générateur de dessin il veut utiliser : connecter deux points par une ligne droite ; générer un cercle à partir du rayon marqué par Sutherland ; effacer des segments de droite ; définir une fenêtre autour d'une certaine partie localisée de l'écran, qui peut alors être copiée ou déplacée vers un autre emplacement ; enregistrer une partie ou toute l'image dans la mémoire de l'ordinateur, la reconstruire et la modifier ; faire pivoter les objets, en faire des symétries, et ainsi de suite. Avec son autre main, celle qui tient le crayon optique, Sutherland dessine sur l'écran en générant une ligne blanche d'une épaisseur d'un sixième de inch n'importe où il le souhaite", (traduit de : The Algorithmic Image, Robert Rivlin, Microsoft Press, p. 18).

Les bases du graphisme informatique ainsi posées, d'autres systèmes seront à leur tour développés. Parmi ceux-ci, le DAC-1 de General Motors, conçu pour la construction de prototypes automobiles, marquera par exemple l'entrée du "Computer Graphics" dans le domaine de l'industrie (illust. n°3). Mais à la fin des années 1960, ces systèmes resteront dans l'ensemble peu nombreux et pour la plupart encore réservés aux grands centres de calcul.

Illust. n°3


LE DEBUT DE L'ART : LES ANNÉES 1960 ET LES ANNÉES 1970 On peut alors imaginer combien il était difficile pour des artistes d'avoir accès à ces systèmes. À cette difficulté venait d'ailleurs s'ajouter celle qu'il fallait savoir programmer, les logiciels interactifs standards n'existant pas encore. Pendant les années 1960 et pour une bonne part 1970, la majorité des travaux de caractère autre que technique seront donc produits par des ingénieurs et des mathématiciens qui chercheront à s'aventurer dans le domaine de l'art. Quant aux quelques musiciens, peintres et sculpteurs qui réaliseront des úuvres sur ordinateur, ils seront la plupart du temps encouragés par des associations telles E.A.T (Experiment in Art and Technology) et travailleront en collaboration avec des scientifiques.

Dans leur ensemble, les images produites durant cette première période, resteront très largement dominées par l'abstraction. Et ce, pour au moins deux raisons : d'une part, pour une raison technique, les sorties graphiques, assez pauvres, étant plus adaptées à des formes géométriques qu'à des formes naturelles et les logiciels dédiés à la création de formes figuratives n'existant pas encore2 ; d'autre part, pour une raison esthétique, les années 1960 et 1970 étant les années où l'art abstrait connaît un certain engouement, notamment au travers de courants tels l'art optique, l'art minimal ou encore le "Post Painterly Abstraction".

En règle générale, ces images se présenteront sous forme d'explorations ou de séries graphiques dans lesquelles seront examinés tous les arrangements et modifications possibles que puisse subir un ensemble d'éléments, de nature le plus souvent géométrique (droites, courbes, polygones, ...). Agencés selon certaines règles, ces éléments entreront par exemple dans la constitution d'effets optiques et de volumes sophistiqués (illust. n°4).

Illust. n°4

Répartis dans l'image selon d'autres lois, ils permettront d'introduire un effet de désordre dans une composition au départ ordonnée et ainsi d'étudier comment celle-ci peut basculer d'un état à un autre (illust. n°5).

Illust. n°5

Enfin, ces éléments pourront subir des distorsions et être assemblés, chacun d'eux appartenant à un répertoire de formes à partir desquelles des instructions seront donc programmées. Quant aux traceurs et aux imprimantes, ils resteront les modes de sortie de ces images les plus utilisés (illust. n°6).

Illust. n°6

Exemples

"Carrés, rupture de monotonie 5", Véra Molnar (illust. n°7).

Illust. n°7

"(...) Ma méthode de travail s'inspire de celle des sciences expérimentales. J'ai un projet, intuitif au départ, que je réalise par une série d'approximations réfléchies. Je définis les éléments de base de l'image, puis je change pas à pas leurs dimensions, leurs proportions et leurs relations en exécutant toujours un nouvel arrangement. (...) Le programme que j'utilise actuellement peut exécuter un réseau de N carrés juxtaposés ou bien emboîtés. Je peux modifier un grand nombre de paramètres : le nombre des carrés, les coordonnées des centres ainsi que celles des sommets obtenant ainsi toutes sortes de quadrilatères ; ne faire apparaître qu'une partie des formes (...). Je peux aussi ajouter des sinusoïdes à phase et à amplitude variables sur les lignes, pour obtenir un trait plus "sensible", plus "tremblant", plus "humain", diraient les critiques d'art. Le programme que j'utilise est encore perfectible bien qu'il produise déjà des images d'une infinie variété. Images dont le module théorique est toujours le réseau de carrés", (Véra Molnar, IBM-Informatique N°13, pp. 26-27).


 
 

"Transformation de structure", Gerd Zwing (illust. n°8).

"Cette série de structures est le résultat de transformations d'éléments uniformes en éléments individuels sans rupture de la proposition de base. L'arrangement de ces éléments est obtenu, non par les lois classiques de la composition qui subordonnent les éléments à une idée directrice, mais par les lois de la statistique et de la probabilité. Des hiérarchies aléatoires apparaissent. Notre perception tend à découvrir des structures complexes à l'intérieur des structures simples", (Gerd Zwing, IBM-Informatique N°13, p. 22).

Illust. n°8



"Computer composition with lines", Michael Noll, (1965) (illust. n°9).

Noll a demandé à un ordinateur de s'inspirer d'un tableau de Mondrian en fournissant comme données : nature des éléments (carreaux ou barres noires plus ou moins allongées), insertion dans une figure globale (cercle) et densité moyenne en chaque point du tableau. Il a obtenu la figure (en bas) qu'il a présenté, avec l'original de Mondrian (en haut) à un certain nombre de sujets en demandant, sans indication ce qu'ils préféraient. Les sujets ont préféré le remake fabriqué par ordinateur et ce, d'une façon significative (55% contre 45%). Ce résultat paradoxal est dû au fait de sociodynamique culturelle, que la conception de Mondrian, existant dans le commerce des multiples depuis une vingtaine d'années, s'est banalisée et a habitué l'úil du spectateur qui retrouve une fraîcheur supplémentaire dans la nouvelle version qui lui est proposée, (Abraham Moles, Art et Ordinateur, p. 104).

Illust. n°9

Quant aux autres images, fixes mais figuratives, elles seront également presque toujours produites sous forme de séries, dans la mesure où l'on cherchera à l'époque à explorer "le champ des possibles", c'est-à-dire les multiples façons dont un dessin au trait peut se déformer et accepter, au cours de ses transformations, des styles différents.

Exemples :

"Sine Curve man", (1966) réalisé par Charles Csuri et James Shaffer, généralement considérés comme les premiers à avoir introduit dans le domaine de l'art informatique des images figuratives (illust. n°10).

Illust. n°10

"Variations" de Leslie Mezei qui, dès la fin des années 1960, utilise des programmes permettant de transformer d'une manière aléatoire des dessins de lettres, d'animaux ou de figures humaines (illust. n°11).

Illust. n°11

"La Faim", Peter Foldès, (illust. n°12). Contrairement aux deux oeuvres précédentes, cette réalisation, primée au festival de Cannes en 1974, se compose d'images animées. Par un procédé d'interpolation, les formes (dessins au trait) se métamorphosent en d'autres formes, annonçant alors un effet qui deviendra à la mode au début des années 1990 : celui de "morphing".

Illust. n°12

Durant ces mêmes années, apparaîtra par ailleurs un autre courant, fondé non plus sur la génération de l'image mais sur son analyse et sa reconstruction. Ainsi, pour démontrer par exemple qu'il existe différents niveaux de perception, des auteurs tels Leon Harmon et Kenneth Knowlton s'attacheront à reconstruire, après les avoir numérisées, des photographies à l'aide de tout un ensemble de symboles identifiables ou non par le spectateur selon sa distance à l'image.

Exemple

"Mouettes", Leon Harmon et Kenneth Knowlton. Après avoir été donc numérisée, l'image est décomposée en colonnes et en lignes. Chaque fragment est ensuite associé à un niveau de gris numérique, lui-même associé à un symbole ayant une valeur de gris visuelle (caractères speudo-graphiques, signes en positifs ou en négatifs) (illust. n°13).

Illust. n°13

Cette même technique sera par ailleurs utilisée dans des úuvres animées.

Exemple

"Poem Field", Stanley Vanderbeek et Kenneth Knowlton, (1967-1969) (illust. n°14). Les combinaisons visuelles ici engendrées (à partir de caractères alphabétiques) rappellent par leur caractère abstrait et animé, certains films expérimentaux réalisés dans les années 1920.

Illust. n°14

Enfin faudrait-il encore mentionner pour compléter ce panorama des années 1960 et 1970, les travaux interactifs ou environnementaux dans lesquels l'ordinateur servira le plus souvent à piloter ou contrôler toutes sortes de dispositifs, dans une approche alors purement cybernétique ; la cybernétique ayant rappelons-le joué, dès le début des années 1950, un rôle déterminant dans le domaine de l'art et particulièrement contribué à l'évolution de la sculpture et de la musique.

Exemple

Nicolas Schöffer fervent de l'Art total, dans son livre le plus important : "La ville Cybernétique" (1969, Édition Tchou, Paris). Elles vont de la construction d'Universités verticales et de Centres de loisirs sexuels, à celle d'ensembles conçus pour le repos ; "Harmonisation des techniques les plus avancées et de l'univers naturel, elles impliquent une réinvention totale de la ville ; en dénonçant le droit à la ville, ce que nous avons perdu, : centre d'activité et d'échanges, autrefois milieu où se crée la culture, elle n'est plus aujourd'hui qu'asphyxie et névrose collective." ; "La société ne subira plus son destin, elle le créera" affirme-t-il (Projet de "La Tour Lumière Cybernétique de Paris", Constitution de l'ensemble cybernétique, 1972, Édition Denoël, http://www.olats.org/schoffer/livlvc1.htm) en expliquant : "L'explosion démographique a mis en évidence un phénomène nouveau et grave dans la société occidentale : le nombre des médiocrisés se multiplie à mesure que celui des humains augmente, bien que le pourcentage entre l'élite et les médiocrisés reste le même ; Le terme de médiocrisation ne doit pas être pris dans un sens péjoratif, mais envisagé sous l'angle de l'évolution et de l'Histoire ; La médiocrisation, c'est l'anomie, le manque d'information ; chaque individu, étant pourvu de sens qui lui permettent de percevoir les phénomènes ambiants, d'enregistrer des informations, de les mémoriser, d'exercer sa combinatoire ; La médiocrité résulte d'un niveau d'information extrêmement bas ; le fait d'empêcher les masses de s'informer, ou de leur fournir des informations médiocres est une des causes de ce sous-développement (L'avenir de l'homme, l'homme de l'avenir, Le processus de médiocrisation, "La Ville Cybernétique", 1968)."

Photo 8.
La société ne subira plus son destin, elle le créera.

"Le Senster", Edward Ihnatowics, (1971) (illust. n°15).

"Le Senster, mobile cybernétique est une sculpture mobile électro-hydraulique de six bras autonome équipés de microphones et de radars. Interprétant les messages transmis par ces "organes" sensoriels, l'ordinateur anime la sculpture en connivence avec les bruits et les mouvements de l'environnement", (Edward Ihnatowics, IBM-Informatique N°13, p. 55).

Illust. n°15



LE DEVELOPPEMENT DE L'ART : LA FIN DES ANNÉES 1970 ET LES ANNÉES 1980

Qu'il s'agisse des micro-ordinateurs, des palettes graphiques ou autres logiciels entièrement dédiés à la création d'images, des scanners, des "machines à peindre3" ou autres périphériques d'entrée ou de sortie, les moyens de production, aussi bien matériels que conceptuels se développent d'une manière considérable dès le milieu des années 1970. Devenus donc accessibles à un grand nombre d'artistes, ceux-ci, convaincus de leurs possibilités nouvelles, n'hésitent plus à les utiliser dans leur travail plastique. Mais si la situation évolue également par rapport aux années précédentes, c'est que se dégagent des travaux de ces artistes, des courants, ou plutôt des tendances esthétiques très différentes les unes des autres, allant du réalisme photographique à l'abstraction, en passant par un art du collage et de l'hybridation.

Ainsi, plutôt que de dresser un catalogue de ces tendances, nous examinerons ici les différentes manières dont sont aujourd'hui utilisés les systèmes informatiques.

La première de ces utilisations revient à considérer l'ordinateur comme un "assistant" capable de prolonger des pratiques et des savoirs faire antérieurs ; l'ordinateur offrant à l'artiste, le choix de tout un ensemble d'outils, le plus souvent regroupés au sein de "palettes graphiques", rappelant ceux dont il dispose dans son atelier (crayons, pinceaux, brosses, aérographes, pots de peinture, ...) et pouvant être maniés d'une manière interactive par le biais d'une souris ou d'un stylo électronique. Appréhendé comme une sorte de cahier à dessin, l'ordinateur permet alors de faire les études ou les images définitives d'un travail plastique qui peut soit, être transposé sur un support traditionnel, d'une manière alors mécanique ou manuelle, soit présenté sous forme de reproduction photographique ou d'enregistrement vidéo dans le cas où l'image est travaillée dans sa dimension temporelle.

Exemples

1) Oeuvres transposées sur supports traditionnels.

"Memory Swirls", Barbara Nessim, (1986) (illust. n°16). Après avoir été imprimée sur un support papier, l'image informatique est rehaussée de pastels.

Illust. n°16

"Gentlemen", Darcy Gerbarg, (1986) (illust. n°17). Reproduite sous forme de diapositive, l'image informatique est projetée sur toile. Après avoir relevé ses contours, Darcy Gerbarg l'exécute à la peinture acrylique.

Illust. n°17

"Appear-Miror-Reflect", Les Levine, (1985) (illust. n°18). Les Levine numérise un de ses dessins (image de droite), puis le manipule sur ordinateur jusqu'à obtenir l'image de gauche. L'ensemble est ensuite photographié, projeté sur toile et exécuté, comme précédemment, à la peinture acrylique.

Illust. n°18

2) Oeuvres présentées sur support photographique ou vidéo.

"Llanos", David Em, (1985) (illust. n°19)/image fixe.

Illust. n°19

"Sans titre, Keith Haring, (1983) (illust. n°20)/image fixe.

Illust. n°20

"Paint With Light", David Hockney, (1986) (illust. n°21)/séquence animée.

Illust. n°21

"Le Courrier des téléspectateurs", Michael Gaumnitz, (1993) (illust. n°22) /séquence animée.

Illust. n°22

Dans une autre utilisation, l'ordinateur est appréhendé comme un moyen d'hybridation entre deux ou plusieurs techniques, toutes sortes d'images pouvant être retravaillées au sein de systèmes informatiques (documents 2D, photogrammes vidéogrammes, ...), voire dans de telles proportions modifiées, que disparaisse tout repère quant à leur nature d'origine (agrandies, diminuées, déformées, coloriées, incrustées, ....).

Exemples

"Number Five, Nancy Burson, (1985) (illust. n°23). L'image résulte de la fusion de deux célèbres tableaux : "La Montagne Sainte Victoire" de Cézanne et "Les usines Huth à Clichy" de Van Gogh.

Illust. n°23

"Le topologue", Marc Caro, (1989) (illust. n°24). Dans ce film d'animation, réalisé dans le cadre d'un hommage à Mélies, des formes 3D, entièrement calculées par ordinateur, sont incrustées dans des séquences vidéo, constituant alors des images appelées "composites", (comme toutes celles effectivement "composées" d'éléments d'origines multiples).

Illust. n°24

A l'opposé de ces démarches, d'autres artistes voient dans l'ordinateur une sorte de "méta-outil" permettant de construire leurs propres instruments de création et non plus de prolonger ceux déjà existants. Dans ce cas, il ne s'agit plus pour eux de se servir de logiciels utilisateurs (applications), mais d'écrire leurs propres algorithmes afin d'obtenir sur l'écran soit :

- Des images inspirées d'un style artistique particulier, mais pourtant capables de les surprendre, ce qui revient le plus souvent à concevoir, dans un esprit assez proche de celui des années 1960 et 1970, des programmes générant des formes 2D.

Exemples

"Sans titre", Harold Cohen, (1985) (illust. n°25)/image fixe. L'image a été produite par un programme informatique qui parvient à simuler le propre style de l'artiste lorsqu'il réalise d'une manière traditionnelle des dessins au trait.

Illust. n°25

- Soit des images quasiment impossibles à créer par le biais d'autres procédés que ceux qui sont algorithmiques et, dans ce cas, généralement annonciatrices d'une nouvelle forme d'esthétique, située le plus souvent entre réalisme et pure imagination. Ce qui revient cette fois-ci à programmer des modèles générant plutôt des formes tridimensionnelles (voir chapitre"l'image 3D").

Exemples

"Eggy", Yoichiro Kawaguchi (1991) (illust. n°26)/séquence animée

Illust. n°26

"Quand le spectateur contemple ces films, (...), il est saisi par la magie des formes qui se succèdent sur l'écran, mais ces formes restent totalement "non figuratives" en ce sens qu'elles n'ont aucun équivalent dans le monde, (...), elles sont le pur produit de l'imagination créatrice. On pourrait légitimement dire que même si le spectateur est fasciné par leur beauté intrinsèque (...), il n'y comprend rien au sens de la reconnaissance des objets du monde. Pourtant émerge à la conscience de la façon la plus évidente l'action que poursuivent ces formes inconnues au cours de son déroulement : il saisit intuitivement l'idée de "naissance", l'idée de "greffe", l'idée de "métamorphose". (...) En d'autres termes, il conçoit avec clarté et évidence (...) l'évolution et la dynamique de formes dont il ignore la nature et le contenu", (Abrahams Moles, Art et Ordinateur, p. 293).

"Automappe", Michel Bret, (1989) (illust. n°27)/séquence animée

Illust. n°27

"En France, Michel Bret qui a lui-même écrit les soixante mille lignes de son logiciel Anyflo, imagine dans Automappe (1989), une sorte de bestiaire composé de créatures étranges, hybride (crapauds à roulettes, oiseau à voile...), dérivant dans un univers de fiction aux architectures délirantes. Le plus étrange dans ces créatures ne se voit pas, ne s'expose pas. Elles obéissent à des règles comportementales définies par l'auteur, mais dont il ne prévoit pas exactement les effets. Elles agissent les unes sur les autres non sans une certaine "liberté" d'action. (...). Il y a, là encore, l'amorce d'une esthétique nouvelle, qui s'intéresse moins à l'apparence des formes qu'à des comportements et des interactions", (Edmond Couchot, "Boites Noires", Art Cinéma, Art Vidéo, Art Ordinateur, p. 56).

LES TENDANCES ACTUELLES (années 1990)

Aujourd'hui, l'art informatique s'affirme en tant que discipline artistique, au travers de manifestations de plus en plus renommées et nombreuses (Ars Electronica, Art Futura, Imagina, Nicograph, Siggraph, ...), mais également de son enseignement dans les écoles d'art, effectivement admis au même titre que celui d'autres pratiques. Or si l'ordinateur est devenu un outil incontournable pour qui cherche à maîtriser les moyens modernes de production, c'est que :

- Ses possibilités n'ont cessé de croître et lui ont permis de se situer au croisement de plusieurs disciplines artistiques (peinture, cinéma, vidéo, ...).

- Son utilisation ne nécessite pas un apprentissage contraignant et devient de plus en plus accessible pour l'artiste.

Quant aux tendances actuelles, elles se situent en règle générale, dans le prolongement de celles qui sont développées dans les années 1980, de nombreux auteurs inscrivant leurs travaux dans des voies déjà tracées, qu'ils s'agissent de la création d'images composites ou encore de celle d'algorithmes spécifiques. Cela dit, en parallèle à ces tendances émergent de nouveaux concepts tel celui d'art génétique et encore de réalité virtuelle, le premier désignant un art qui s'inspire de la logique du vivant, et le second impliquant que le spectateur puisse pénétrer dans l'image et manipuler chacun de ses éléments constituants4. Enfin si la participation de ce dernier est aujourd'hui intégrée dans de nombreuses úuvres (spect-acteur), cette participation risque de devenir grandissante dans les années futures avec le développement de réalisations interactives et multimédias, dont les supports seront alors multiples et le concept se rapprochera de celui "d'art total" déjà formulé dans les années 1960.

Exemples

"Primordial Dances", Karl Sims, (1992) (illust. n°28)

Illust. n°28

Dans l'installation présentée, les spectateurs observent le déroulement d'une évolution simulée par ordinateur tout en étant les acteurs qui déterminent et orientent cette évolution. L'ordinateur affiche une population d'images sur 16 écrans vidéo en arc de cercle. Les spectateurs se dirigent vers les images de leur choix, se placent sur des capteurs au sol et sélectionnent ainsi celles qui sont amenées à survivre. Les images qui n'ont pas été retenues sont immédiatement éliminées et remplacées par de nouvelles images descendantes des survivantes, copies et combinaisons de leurs parents avec de multiples variations. Ainsi dans cette installation interactive, ce sont les visiteurs qui déterminent interactivement l'aptitude des images à survivre. Spectateurs de cette évolution simulée, ils choisissent collectivement leur cheminement vers des populations d'images inédites", (Revue virtuelle, Images évolutives, carnet n°5).

"The legible City", Jeffrey Shaw (1990) (illust. n°28).

Illust. n°29

"The legible City" est une image numérique tridimensionnelle d'une surface virtuelle d'environ 6 Km2. Le promeneur voyage interactivement dans cet espace au moyen d'une bicyclette. Au sol, cet espace se situe à Manhattan, au sud de Central Park. Au lieu de bâtiments longeant les avenues et les rues, l'écrivain Dirk Groeneveld a écrit une série d'histoires pour ce travail dont les lettres et les mots constituent l'architecture visuelle et indique au système infographique la position et la vitesse de la bicyclette. D'après ces informations, l'ordinateur calcule et affiche sur l'écran les séquences d'images correspondantes. Cette interaction en temps réel de la bicyclette et de l'image permet au cycliste de circuler en parfaite liberté. En suivant les rues, en tournant à certains carrefours, en allant au hasard et même en passant au travers des lettres, chaque cycliste choisit son propre cheminement dans la "ville lisible" construisant ainsi une lecture unique du texte", (Jeffrey Shaw, "Revolution, The virtual Museum", Les métaphores du virtuels, 1992).

Une visite, à St Malo (Quai des Bulles, Octobre 1999) au Traveling Art Show du Siggraph nous montre l'évolution des années 1993 à 1997. Et la connection au site du Siggraph Art et Design permet de suivre un point de vue de l'état de l'art.

Quelques auteurs : Babiole Cécile, Barbadillo Manuel, Bret Michel, Burson Nancy, Caro Marc, Cohen Harold, Csuri Charles, Em David, Fujihata Masaki, Foldes Peter, Franke Herbert, Gaumnitz Michael, Gerbarg Darcy, Harmon Leon, Huitric Hervé, Ikam Catherine, Kawaguchi Yoichiro, Knowlton Kenneth, Kodratoff Yves, Latham William, Lewitt Ruth, Mezei Leslie, Molnar Véra, Mohr Manfred, Nahas Monique, Nees Georg, Negroponte Nicolas, Nessim Barbara, Noll Michael, Porada Sabine, Sims Karl, Waliczky Tamàs, Weibel Peter, Whitney James, Whitney John, ....

Notes :

1 Association créée en 1966 par Robert Rauschenberg et Billy Kluver en vue de rapprocher l'art et la technique.

2 Voir Edmond Couchot "De l'Optique au Numérique", pp. 137, 138.

3 Robots connecté à l'ordinateur capable de transposer sur toile l'image informatique.

4 Le spectateur est muni d'un casque de visualisation et de gants à retour d'effort.

Mots clés : Abstraction, Art cinétique, Art conceptuel, Art cybernétique, Art génétique, Art permutationnel, Computer Art, Computer Graphics, E.A.T., Imagina, Image de synthèse, Imprimante, Infographie, Interactivité, Multimédia, Op art, Palette graphique, Programmation, Réalisme, Réalité virtuelle, Siggraph, Téléprésence, Traceur,...

BIBLIOGRAPHIE

OUVRAGES GÉNÉRAUX

Art et Ordinateur, A. Moles, Ed. Blusson, 1990.

Catalogue de l'Exposition Electra : F. Popper, Musée d'Art moderne de la ville de Paris, Les amis du musée de la ville de Paris, 1983.

De l'Optique au Numérique, E. Couchot, Ed. Hermès, Paris 1988.

Digital Vision Computer and Art, C. Goodman, Ed. Harry N. Abrams, Distribution Media Magic, New York 1987.

IBM- Informatique n°13, IBM France , 1975.

L'Art à l'Age Electronique, F. Popper, Ed Hazan, 1993.

Le Livre d'Imagina, INA Publication, 1990.

Les Métaphores du Virtuel, Ministère de la culture et de la communication, 1992.

Nouvelles Images, Nouveau Réel, Cahiers internationaux de sociologie, vol. LXXXII, Jan. Févr. 1987.

Paysages Virtuels, Image, Vidéo, Image de synthèse, Ed. Dis Voir, Paris 1988.

Technologies et Imaginaires : Art Cinéma, Art Vidéo, Art Ordinateur, Ed. Dis Voir, Janvier 1990.

ARTICLES, NUMÉROS SPÉCIAUX ET THESES DE DOCTORAT

Computer Art, B. R. Smith, in Groupes, Mouvements, Tendances de l'Art Contemporain depuis 1945, Ecole nationale supérieure de Beaux-Arts, Paris, 1990.

Image de Synthèse, J. Castel, in Groupes, Mouvements, Tendances de l'Art Contemporain depuis 1945, Ecole nationale supérieure de Beaux-Arts, Paris, 1990.

L'Image Artistique et les Techniques Nouvelles, G. Pujo Pujo, Université de Paris I, 1991 (côte : 91 PA 010563).

L'Odyssée du Virtuel, les dossiers de l'Audiovisuel, INA, Documentation française, 1991.

Nouvelles Technologies, Un art Sans Modèle, Art Press, Numéro spécial, 1991.

Où va l'Image ?, les dossiers de l'Audiovisuel, N°26, INA, Documentation française.

Revue Virtuelle, carnet n°1, 2, 3, 4,..., Edition du centre Pompidou, Paris, 1992, 1993, ...

REVUES SPÉCIALISÉES

Computer Graphics (publication anglaise), Leonardo, Mac Création, Nov'art, Pixel Magazine, Création Numérique, Tech Images, ...